Relations entre burnout et intelligence émotionnelle dans un échantillon de 202 enseignants : Quelles compétences émotionnelles développer en formation pour durer dans le métier ?

Abstract

Les compétences émotionnelles d’un individu renvoient à une vaste palette de connaissances, habiletés et dispositions qui peuvent être subdivisées en deux grandes catégories (Brasseur et al., 2013) : les compétences intrapersonnelles (p.ex. comprendre, exprimer, réguler ses émotions) et les compétences interpersonnelles (p.ex., identifier, écouter, réguler les émotions d’autrui). De bonnes compétences émotionnelles contribuent notamment à une meilleure santé mentale et physique, à des relations sociales plus satisfaisantes et à une plus grande réussite professionnelle (Mikolajczak et al., 2014).

Même si le burnout touche tout type de professions (Maslach et al., 1997), celles caractérisées par la prédominance des relations interpersonnelles (professions dans le domaine de soins et de l’enseignement en particulier), sont sans doute les plus vulnérables. Ainsi, dans le milieu scolaire, les taux importants d’abandon et de burnout suggèrent que les enseignants devraient disposer de meilleures compétences émotionnelles encore afin de faire face aux nombreuses demandes affectives inhérentes à ce métier (p.ex., gérer des situations difficiles mais aussi créer des leviers dans les processus d’enseignement/apprentissage).

Cette recherche examine les relations entre compétences émotionnelles et burnout dans un groupe de 61 enseignants «chevronnés» (plus de 25 ans d’expérience) et dans un groupe de 67 enseignants « jeunes » bénéficiant de 1 à 10 ans d’expérience. Pour ce faire, ils ont répondu à trois questionnaires permettant d’évaluer (1) leur niveau de burnout selon les trois dimensions du Maslach Burnout Inventory (Maslach & Jackson, 1986), (2) leurs compétences émotionnelles sur dix dimensions du profil de compétences émotionnelles (Brasseur et al., 2013), ainsi que (3) leur bien-être évalué par la Short Happiness Scale (Kotsou & Leys, 2017).

Les résultats obtenus dans les analyses de régression incluant les 10 compétences émotionnelles comme prédicteurs des trois dimensions du burnout indiquent comme unique similitude entre les deux groupes qu’une meilleure compréhension de ses émotions est associée à des scores plus faibles de dépersonnalisation et qu’une meilleure régulation de ses émotions est associée à moins d’épuisement émotionnel. Les différences entre les deux groupes font globalement ressortir que de meilleures compétences interpersonnelles sont plus fréquemment associées à des symptômes plus faibles de burnout dans le groupe des enseignants chevronnés.

La discussion de ces résultats fera des liens avec d’autres travaux menés dans le domaine et incluront également les limites méthodologiques de notre récolte de données.

Ainsi – et dans la mesure où les compétences émotionnelles semblent des variables intermédiaires entre le stress ressenti et le développement du burnout (dans ses trois dimensions) – différentes pistes concrètes pour aborder ce thème en formation (initiale ou continue) sont évoquées. Taillées sur mesure, les démarches que nous présenterons visent à favoriser le développement de compétences émotionnelles spécifiques chez les enseignants en prévention de différentes difficultés associées au stress et au burnout. Ces dernières devraient permettre aux enseignants de développer des stratégies à même de les protéger mieux encore des nombreux stresseurs auxquels ils sont soumis dans leur activité professionnelle.