L'enseignement mutuel au Tessin des années 1820 : une école publique avant la lettre ?

Abstract

Les années 1820 sont caractérisées au Tessin par la création de certaines écoles d'enseignement mutuel. La mise en place de ces institutions répond à un mouvement plus général qui implique également plusieurs domaines italiens, notamment le Lombardo-Veneto, et d'autres cantons suisses (Tinembart & Pahud, 2019 ; Di Pol, 2016). Par sa position géographique, le Tessin devient donc naturellement un couloir entre le sud et le nord, représentant ainsi, grâce à la circulation de personnes et d'ouvrages, un laboratoire pour le développement de cette méthode. L'institution de ces écoles représente une double réponse. D’un côté elle peut être considérée comme une réaction à l'état d'inertie sur lequel l'école publique repose depuis le début du siècle (après la promulgation de la première loi sur l'école, 1804) ; de l'autre elle répond aux besoins imposés par la modernisation de la société, qui dans le cas du Tessin se traduisent dans la construction politique, économique et culturelle du nouveau canton. L'institution de ces écoles engendre rapidement un débat controversé qui oppose le milieu ecclésiastique au jeune État tessinois, portant à des conséquences négatives sur le développement de ces écoles (Mena, 1998). Par le biais de la théorie des transferts culturels, l'étude du développement, de l'expérience et des controverses liés aux écoles d'enseignement mutuel au Tessin, permet de comprendre la déclinaison de cette méthode d'enseignement dans le canton italophone et les raisons de ce choix, tout en soulignant le rôle joué par certains personnages et certains ouvrages dans cette dynamique dont le caractère est purement transcantonal et transnational. De plus, cette étude permet de cerner le rôle moteur que cette dynamique a eu dans l'introduction au sein du débat public de la réflexion sur l'école publique et notamment dans le développement de celle-ci, ainsi que les défis politiques, économiques et culturels à la base de la modernisation de l'État.