Alors que l’éducation à la citoyenneté numérique (CN) devient une finalité de l’école publique suisse romande, l’appréhension des savoirs numériques se heurte à des logiques de genre. Sur la base de ce diagnostic, les formes que la CN pourra revêtir ainsi que ses conditions et possibilités de développement méritent d’être questionnées.En réponse à ces interrogations, notre recherche se propose d’examiner la pertinence d’un croisement entre des pratiques pédagogiques en éducation à la CN et les apports des épistémologies féministes. Ce faisant, la répartition et la nature des interactions entre des enseignantes du primaire et leurs élèves sont étudiées en vue de saisir la manière dont les rapports sociaux de sexe informent le rapport au savoir de l’apprenant·e.Nos analyses révèlent des échanges genrés susceptibles de nourrir des CN différenciées: vulnérables vsengagées. Les filles sont essentiellement appelées à adopter des conduites responsables en ligne à la différence des garçons dont l’apprentissage est orienté vers des aspects plus techniques encourageant l’exercice d’une forme d’agentivité numérique. Des situations pédagogiques potentiellement porteuses de plus d’égalité face aux savoirs numériques sont aussi explorées. Notre article vise ainsi à documenter comment le genre travaille l’éducation à la CN et invite, par les réflexions épistémologiques qu’il suscite, à renouveler nos conceptions éducatives.