Les enseignants issus de la migration (EIM) constituent une population encore relativement peu étudiée en Suisse romande. La recherche doctorale sur laquelle s’appuie cette contribution cherche à analyser les spécificités de leurs trajectoires de formation, souvent peu linéaires (Gomensoro & Bolzman, 2016), et leurs impacts sur les pratiques professionnelles. Nous postulons que leur perception de la scolarité des élèves issus de la migration et des facteurs susceptibles d’améliorer leur réussite scolaire et éducative est influencée par leur propre parcours (Niyubahwe et al., 2019).

La communication portera sur le développement, chez de futurs EIM, de compétences transversales et d’éléments externes qui ont favorisé leur résilience (Terrisse & Larose, 2001) face à des facteurs de risque rencontrés dans leur propre scolarité. Elle cherchera également à mettre en évidence la présence de ressources attitudinales et éthiques susceptibles de favoriser la réussite scolaire et éducative (Feyfant, 2014) des élèves issus de la migration qui leur sont confiés.

La recherche s’appuie sur une méthode qualitative à visée compréhensive. La récolte de données a été réalisée au travers d’entretiens semi-directifs. Trente-six entretiens concernent des futurs EIM en troisième et dernière année de formation en enseignement primaire à la HEP Vaud. Des entretiens complémentaires ont été effectués avec 6 d’entre eux environ 18 mois après l’obtention de leur diplôme. L’âge moyen des répondants est d’environ 26 ans lors de la première rencontre. Les entretiens ont fait l’objet d’un enregistrement audio et les transcriptions ont fait l’objet d’une analyse thématique en deux temps.

Les résultats ne permettent pas d’établir s’il y a une évolution en termes d’importance des inégalités scolaires et des discriminations subies entre la génération des futurs EIM et celle de leurs élèves. Les formes de discriminations constatées ont cependant peu évolué.
Les EIM se montrent particulièrement sensibles à l’expression de stéréotypes et de préjugés touchant les élèves issus de la migration. Ils se montrent cependant réticents à se voir assignés aux classes et établissement concentrant les plus forts taux de diversité culturelle et sociale. Ils proposent par ailleurs des pistes visant l’amélioration de la réussite scolaire et éducative des élèves issus de la migration qui tiennent compte de ce qui leur a fait défaut lors de leur propre scolarité ou des facteurs de protection qui ont contribué à la réussite de leur propre parcours.
Si l’apport des EIM pour la réussite scolaire des élèves issus de la migration semble se confirmer, ils ne constituent pas l’unique solution pour y parvenir et les pistes évoquées s’avéreraient applicables par tous les enseignants. Le développement, au travers de la formation, de compétences transversales favorisant la prise de conscience des mécanismes de discrimination touchant les élèves issus de la migration constitue en ce sens un défi intéressant.